Les titres participatifs (TP), obligations hybrides historiques
par : Robin des bonds
Les titres participatifs sont d'anciens titres obligataires en voie de disparition. Ils n'ont pas de maturité et leur rémunération est indexée sur des facteurs économiques de l'entreprise.
L'essentiel
- Les titres participatifs sont des titres perpétuelles émis dans les années 80 par des entreprises semi-publiques.
- Aujourd'hui, il ne reste plus qu'une dizaine de souches en circulation.
- Illiquides, ils ont surtout un intérêt à titre de curiosité.
- Certains ont un petit aspect spéculatif
Titres participatifs : définition
Les titres participatifs sont une forme d'obligation hydride perpétuelle dont le coupon est indexé sur des facteurs économiques (chiffre d'affaires ou profitabilité de l'entreprise par exemple).
Dans cette page, je ne traiterai que des titres participatifs émis dans les années 80 par le gouvernement français lors des privatisations et des nationalisations d'entreprises.
Techniquement, d'autres titres participatifs existent, mais ils sont tellement rares que je les considère plutôt comme des titres hybrides.
Histoire des titres participatifs
En 1981 et 1982, le nouveau gouvernement socialiste met en place une campagne de nationalisation, et de nombreux groupes sont retirés de la cote contre indemnisation, tant industriels (Thomson, Saint-Gobain-Pont-à-Mousson, Rhône-Poulenc, Pechiney, Sacilor, Usinor) que financiers (Paribas, Suez, CIC, Crédit du Nord, Crédit Commercial de France, Banque Rotschild, Banque Worms, Banque La Hénin…).
Toutes ces entreprises rejoignent donc le giron public.
Après quelques temps, le gouvernement constate que les besoins de financement des nouvelles entreprises publiques sont de loin supérieurs à la capacité de l’État.
L’État doit donc rechercher des capitaux afin de financer le développement industriel de ces sociétés. L’endettement de ces sociétés étant déjà élevé, la solution est de céder certaines filiales au privé, ou de renforcer les fonds propres des sociétés.
Mais le problème réside alors dans le contrôle. Pour certaines sociétés, il était hors de question de voir des intérêts privés influer sur la stratégie d’un groupe public. L’État crée donc un nouvel instrument financier, le Titre Participatif (TP).
Les premiers titres participatifs ont été créés en 1983.
Des quasi-fonds propres
Les premiers TP ont donc été émis par les sociétés publiques ayant besoin de « quasi-fonds propres » : des ressources financières à mi-chemin entre le capital et la dette. Conséquence logique, ces titres sont à mi-chemin entre les actions et les obligations : on les qualifie donc de titres hybrides.
Comme les actions, ils n’ont pas de date de remboursement contractuelle Comme les obligations, ils versent un coupon régulier.
BNP Paribas, Renault, Saint Gobain, Sanofi, Thomson… se sont ainsi financés. Profitant de la démocratisation de ce nouvel instrument, des coopératives ont elles aussi émis des TP pour renforcer leurs fonds propres sans céder de droits de vote.
Les TP ne peuvent être émis que par trois types d'émetteurs : - les sociétés publiques - les sociétés coopératives - les mutuelles
S’il ne reste que peu de TP cotés en bourse aujourd’hui, cela ne signifie pas que l’instrument est devenu obsolète : il reste utile aux acteurs de l’économie sociale, qui en émettent encore aujourd'hui (mais hors Euronext).
La rémunération des titres participatifs
Afin d’intéresser les porteurs de titres à la bonne marche de l’entreprise, la rémunération des TP est en partie indexée sur les performances de l’entreprise.
Tous les titres comportent en outre toujours une clause de coupon minimal, et parfois de coupon maximal.
Les émetteurs ont fait preuve d’une grande créativité mais le taux minimal peut ressembler :
- soit à un taux fixe, le TP se comportera alors plutôt comme une obligation à taux fixe,
- soit à un taux variable comme le TMO, le titre participatifs se comportera plutôt comme une obligation à taux variable.
Boursièrement, la partie minimale du coupon offre un parachute, et la partie indexée permet de bénéficier de la croissance de l’entreprise.
En outre, un aspect spéculatif existe car certains titres comportent des clauses mentionnant un possible remboursement à des conditions très attractives. En effet, l’entreprise peut décider de se débarasser de cette dette perpétuelle dans des conditions définies dans le prospectus. Cependant, l’histoire nous a montré qu’elles préfèrent généralement procéder par OPA, à des cours bien moins cher que le cours prévu… c’est la vie des marchés !
Toutes ces conditions sont très différentes d’un titre à l’autre : c’est ce qui les rend intéressants !
La subordination
Placés à mi-chemin entre l’obligation perpétuelle et l’action, privés de droit de vote mais bénéficiant d’une rémunération supérieure, il est normal que les TP soient peu favorisés en cas de liquidation.
Les titres participatifs sont subordonnés de dernier rang : en cas de liquidation, ils ne sont remboursés qu’après désintéressement de tous les créanciers. Les porteurs de titres participatifs ont les mêmes droits que les actionnaires en matière de communication des documents sociaux.
Cependant, ils sont plus sécurisés que les obligations subordonnées « modernes ». En effet, les titres participatifs ne prévoient pas de clause permettant à l’émetteur de supprimer un coupon : les coupons sont obligatoires et payés chaque année.
La fiscalité des titres participatifs
Le régime fiscal des titres participatifs est celui des obligations ordinaires, avec tout de même une différence (voir aussi la page : fiscalité des obligations).
Les coupons des TP émis avant le 1er janvier 1987 (enfait, c’est valable pour toutes les obligations d’avant 87) font l’objet d’une retenue à la source de 15 % qui est restituée sous forme de crédit d’impôt (2CK), à inscrire sur la déclaration de revenus si ce n’est pas déjà automatiquement fait. Outre cette retenue à la source, la fiscalité est similaire à celle des obligations (prélèvement libératoire ou intégration dans les revenus pour les coupons).
En cas de remboursement, il y a aussi des exceptions :
Pour les titres émis avant le 1er janvier 1992, lors du remboursement des titres par l’émetteur, on peut définir :
-
une plus-value de remboursement, égale à la différence entre le prix d’émission du titre et son prix d’acquisition, si ce dernier est inférieur. Cette plus-value ne relève pas de l’imposition des gains de cessions prévu par l’article 150-0 A du CGI, car le remboursement ne constitue pas une cession. En outre, cette plus-value ne présente pas le caractère d’un revenu mobilier dès lors qu’elle ne provient pas d’un versement de l’émetteur. La plus-value de remboursement n’est donc pas soumise à l’impôt sur le revenu, sauf si le titre est inscrit à un actif professionnel
-
une prime de remboursement, égale à l’excédent du prix de remboursement du titre sur le prix d’émission. Cette prime constitue un revenu mobilier.
En clair : si vous achetez sous le pair et êtes remboursé au pair, le remboursement n’est pas soumis à l’impôt (mais j’ignore ce qu’il en est pour les prélèvements sociaux).
Cependant, rares sont les intermédiaires financiers au courant de cette règle. La plupart placeront votre plus-value dans la même case que les plus-values sur valeurs mobilières… À vous de voir si cela vaut la peine de faire corriger. Vous pouvez aussi corriger de votre plein gré.
Les titres participatifs encore cotées sur Euronext Paris
Emetteur | ISIN | Taux | Liens analyse | Lien cours |
---|---|---|---|---|
Renault | FR0000140014 | fixe + indexé CA, sans plafond | analyse , prospectus | euronext , boursorama |
Diac | FR0000047821 | 100-130% du TAM, plancher 6,5% | analyse , prospectus | euronext , boursorama |
Sanofi | FR0000140022 | indexé CA, sans plafond | analyse , prospectus | euronext , boursorama |
Sanofi | FR0000047656 | indexé CA, sans plafond | analyse , prospectus | euronext , boursorama |
Saint-Gobain | FR0000140030 | 75% – 125% du TMO | analyse , prospectus | euronext , boursorama |
Saint-Gobain | FR0000047607 | 75% – 125% du TMO | analyse , prospectus | euronext , boursorama |
BNP Paribas | FR0000047664 | 80% – 130% du TMO | analyse , prospectus | euronext , boursorama |
BNP Paribas | FR0000140063 | 80% – 130% du TMO | analyse , prospectus | euronext , boursorama |
BNP Paribas ex-Fortis | FR0000047839 | 80% – 125% du TMO | analyse , prospectus | euronext , boursorama |
BNP Paribas ex-Banque de Bretagne | FR0000047797 | 85%-130% du TMO, min 7,5% | analyse, prospectus | euronext , boursorama |
CIC Lyonnaise de Banque | FR0000047805 | entre 85% et 130% de la moyenne TAM TMO | analyse , prospectus | euronext , boursorama |
CIC Lyonnaise de Banque | FR0000047789 | entre 85% et 130% de la moyenne TAM TMO | analyse, prospectus | euronext , boursorama |
Natixis | FR0000047722 | ?? | analyse, prospectus | euronext , boursorama |
Titres participatifs remboursés par l’émetteur
- Banque de Bretagne – 1985 – FR0000047797 – a été remboursée
- BPC-Fortis – FR0000047839 – a été remboursée
- Credit Lyonnais – 1984 – FR0000140071 : a été remboursé au pair en 2021 (après modification du contrat)
- Caisse Centrale du Crédit Coopératif (CCCC) – 1986 – FR0000047680 : a été remboursé à 142 € (sous le pair de 152,45 €) après modification du contrat, en décembre 2022
- Gaz de France – 1985 – FR0000047748 – OPA en 2013 à 105% du pair, je crois qu’il a été sorti de la cote en 2014
- Thomson – 1983 – FR0000140048 – a été remboursé en 2017