Les émissions obligataires (marché primaire)

En résumé

Sommaire

Comment fonctionne une émission obligataire

Le marché primaire est le marché sur lequel sont émis les nouveaux titres financiers (actions, obligations, etc.).

Il n’y a pas de lieu physique puisque toutes les opérations sont aujourd’hui informatisées, mais le marché est le contexte juridique et temporel au cours duquel un émetteur (Etat, collectivités locales, entreprises publiques, entreprises privées) peut créer des obligations nouvelles et ainsi se procurer les capitaux nécessaires à leur financement.

Au moment de l’émission des obligations, celles-ci sont proposées pour la première fois, d’où le nom de « marché primaire ». Les transactions y sont effectuées entre l’émetteur et les investisseurs. C’est d’ailleurs ce qui différencie le marché primaire du marché secondaire :

  • Sur le marché primaire, les opérations ont lieu entre l’émetteur et les investisseurs. L’argent de l’investisseur va réellement dans les caisses de l’émetteur.
  • Sur le marché secondaire, les opérations ont lieu entre deux investisseurs (le vendeur et l’acheteur). L’émetteur n’intervient pas et n’est pas au courant de la transaction. L’argent de l’acheteur va dans les poches du vendeur.

Comment fonctionne le marché primaire ?

Contrairement aux actions, le marché primaire des obligations est, en général, réservé aux investisseurs institutionnels (banques, assurances, fonds de pension, hedge funds, sociétés de gestion…).

Il existe plusieurs moyen d’émettre des obligations, je vais en détailler trois : l’émission par livre d’ordres, l’adjudication et le placement privé.

L’émission par livre d’ordres (book-building)

Dans un premier temps, les émetteurs à savoir les collectivités publiques, les entreprises, l’Etat , fixent la nature des obligations (taux fixe, taux variable, convertible, perpétuelle…) ainsi que leurs caractéristiques (modalités de souscription, prix d’émission, primes de remboursement, maturité,…).

Une fois la nature et les caractéristiques des titres définies, l’émetteur va mandater une ou plusieurs banques pour placer les titres auprès des investisseurs. Placer signifie démarcher et convaincre d’acheter. Il y a réellement des commerciaux qui appellent les investisseurs pour leur signaler qu’une nouvelle émission est en cours, et récolter leur intérêt.

Les banques en charge de placer les obligations récoltent des ordres auprès des investisseurs professionnels et constituent un carnet d’ordres (d’où le terme book-building). Ce type de placement est réservé aux investisseurs professionnels. Les particuliers qui souhaitent y participer, doivent passer par l’intermédiaire d’une banque ou d’une société de bourse.

Chaque investisseur donne le montant qu’il souhaite acquérir et le prix qu’il est prêt à payer. Une fois tous les ordres récoltés, les banques « servent » leur client en fonction de la taille de l’émission et des montants qui ont été demandé. Si une émission obligataire est sur-souscrite, c’est à dire qu’il y a plus d’ordres d’achats que d’obligations à émettre, alors les investisseurs n’obtiendront pas la totalité des obligations qu’ils ont demandé.

  • Processus : L’émetteur publie un prospectus contenant des détails sur l’obligation, tels que le montant, le taux d’intérêt, la maturité, les modalités de paiement, etc. Les investisseurs intéressés soumettent ensuite des ordres d’achat à leurs intermédiaires financiers, tels que des banques ou courtiers.
  • Prix : Le prix d’émission est déterminé par la demande du marché. Les investisseurs soumettent des offres d’achat à des prix spécifiques, et l’émetteur choisit le prix et les conditions qui lui conviennent le mieux.
  • Attribution : Les titres sont attribués aux investisseurs en fonction de leurs ordres, du prix qu’ils ont proposé, de la quantité demandée, et des conditions établies par l’émetteur.
  • Flexibilité : Ce processus offre une plus grande flexibilité à l’émetteur pour fixer le prix et allouer les titres en fonction de la demande. Il peut adapter les conditions en temps réel pour maximiser la levée de fonds.

L’émission par adjudication : surtout pour les Etats

Le marché obligataire le plus important en taille est de loin celui des obligations d’Etat.

Les plus importants émetteurs, comme les Etats-Unis, l’Allemagne, la France ou le Japon, procèdent à des émissions obligataires régulièrement, souvent plusieurs fois par mois.

Pour chaque Etat, il y a une agence en charge de la gestion de la dette publique qui s’occupe d’émettre les obligations dans le cadre de cette procédure d’enchères. La US Treasury pour les Etats-Unis, la Deutsche Finanzagentur pour l’Allemagne, l’Agence France Trésor pour la France, etc.

La procédure d’émission est appelée « ajududication ». Il s’agit en fait d’un système d’enchères inversées.

L’adjudication se déroule en deux phases.

  1. Au cours de la première phase, les participants laissent des offres avec les prix en pourcentage du nominal pour les montants qu’ils sont prêts à acheter des obligations émises par l’Etat.
  2. Dans un deuxième temps, l’agence en charge de l’émission dépouille les ordres, et décide le montant qu’elle va émettre et quel taux elle est prête à payer. Ainsi, si les taux offerts sont trop élevés, l’agence peut très bien décider de n’émettre aucune obligations. Au contraire, si les taux offerts sont intéressants, l’agence émettra la totalité de ce qui était prévu.

Exemple : les ordres suivants sont laissés par un des participants

  • 99,80% 100 M€
  • 99,75% 200 M€
  • 99,70% 300 M€

Après avoir dépouillé les offres, l’Etat émetteur fixe le prix limite auquel il veut vendre ses obligations (par exemple 99,75%) en donnant le pourcentage de réduction à ce prix (par exemple 50%). Le participant ayant laissé les ordres ci-dessus obtiendra alors 100 M€ à 99,80% et 100 M€ (50% de 200 M€) à 99,75%. Son ordre à 99,70% ne sera pas exécuté.

Ce processus est transparent, mais il y a une compétition entre acheteurs pour obtenir des titres. Le taux n’est pas connu à l’avance. Lorsque les acheteurs désertent, l’adjudication se passe mal et les taux des obligations nouvelles peuvent fortement augmenter.

À l’heure dite, l’émetteur arrête les carnets d’ordres et sert les acheteurs en commençant par les mieux disant (ceux qui acceptent le taux le plus faible). Même si les ordres ont été placés à des taux différents, tout le monde est servi au même taux.

Pour améliorer la liquidité du marché obligataire, les obligations sont émises par abondement : les obligations nouvelles ont souvent des caractéristiques calquées sur une souche existante.

Les investisseurs achètent au taux souhaité par un ajustement du prix.

Les émissions publiques pour les particuliers

Lorsque les émissions s’adressent aux particuliers, l’émetteur doit respecter des règles assez strictes, notamment en matière de communication et de documentation, sensées protéger les « petits épargnants ». C’est une des raisons pour lesquelles ces émissions pour les particuliers ne sont pas plus développées.

Dans ce cas de figure, l’émission d’obligations ne se fait pas par « book-building ». L’émetteur propose une partie ou la totalité des obligations aux particuliers à un prix, le prix de souscription, fixé à l‘avance. L’investisseur individuel connaît donc le rendement de l’obligation qu’il va acheté à l’avance (contrairement aux investisseurs professionnels qui laissent des ordres et qui ne connaissent que le rendement minimum, c’est à dire le prix maximum, qu’ils sont prêt à concéder).

La seule inconnue est la quantité d’obligations qu’obtiendra le particulier. En effet, il laisse un ordre pour une quantité voulue, mais là encore, si l’émission est sur-souscrite, il recevra une quantité inférieure à celle demandée. En règle générale, les bonnes émissions sont sursouscrites, et les mauvaises peu souscrites. On reçoit donc peu d’obligations des bonnes, et beaucoup des mauvaises. Le placement privé : lorsque l’émetteur a déjà les investisseurs

Le placement privé

Le placement privé est un autre type d’émission. L’émetteur négocie directement avec un nombre limité d’investisseurs qualifiés (institutionnels) sans faire appel à un large public d’investisseurs. Les termes de l’émission sont négociés de gré à gré. Les détails de l’émission ne sont pas généralement rendus publics, et l’émetteur a plus de contrôle sur les conditions de l’offre, qu’il peut structurer selon ses besoins ou ceux des investisseurs. Le titre ne sera pas coté en bourse, les investisseurs le conserveront généralement jusqu’à échéance. Il peut exister un marché secondaire, mais très restreint, de gré à gré.