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Quand vendre ses obligations ?

par : Robin des bonds

J'ai un portefeuille d'obligations, certaines en plus-values, d'autres en moins-values. Quand les vendre ? Comment savoir si c'est le bon moment ?

La réponse en bref

  • La plupart du temps, vous n'avez pas à vous poser la question : conservez-les à échéance
  • Le bon moment dépendra de la raison pour laquel vous avez détenu ces obligations
  • Dans une optique de diversification de portefeuille, la vente se fait sur des rebalancements

Trouver le bon moment n'est pas nécessaire

Contrairement aux actions, les obligations ne demandent pas d’avoir un bon market timing à la vente. Avec les obligations, la performance se fait généralement à l’achat, ensuite il suffit de laisser le scénario se dérouler.

Bien entendu, les obligations ne sont pas garanties en capital : il est possible de réaliser une moins-value si l’on vend moins cher que ce que l’on a acheté, ou si l’émetteur fait défaut. Je vous invite à vous reporter aux risques des obligations.

Ne pas vendre, attendre l'échéance

La plupart des obligations ont une date d’échéance : c'est la porte de sortie naturelle d'un investissement obligataire.

Par conséquent, si vous avez été heureux de votre taux de rendement actuariel lors de l’achat, alors vous devez détenir l’obligation jusqu’au terme pour le concrétiser ce rendement.

Si vous avez acheté une obligation parce qu'elle vous offrait un rendement annualisé de 6% par an pendant le 5 prochaines années, et que l'émetteur reste solvable, pourquoi la vendre ? Attendez simplemnet son échéance.

C’est la situation la plus simple.

Cependant, il peut exister des situations où il est pertinent de revendre avant le terme. Et il y a aussi le cas des obligations perpétuelles, qui n’ont pas de date de maturité.

Voyons donc quelques cas.

Les raisons de vendre des obligations

Lorsque qu’elles arrivent bientôt à échéance et ne rapportent plus assez

Imaginez le scénario suivant. Vous avez acheté une obligation il y a quelques années. Le temps a passé, et elle est désormais très proche de son échéance : sa date de remboursement est dans 6 mois.

Pour l’anecdote, on appelle ces titres des « queues d’obligations ».

Hors cas particulier, le cours d’une obligation ser proche du pair.

Si votre queue d’oblig a un risque faible (État, entreprise bien notée), elle se comportera comme un quasi-titre monétaire, et son taux de rendement sur la période restante sera le taux du marché monétaire.

A vous de voir alors si vous avez accès à d’autres placements plus rémunérateurs (livret A, compte à terme, fonds monétaire, etc.) avec la même maturité.

Dans ce cas, il est intéressant de vendre votre obligation dès maintenant pour placer sur des meilleurs supports. Vous vous débarrassez du risque de crédit, gagnez en liquidité et conservez la même maturité.

Bien sûr, vous pouvez aussi décider de rallonger la maturité, de changer d’émetteur, etc.

Evidemment, si votre obligation est peu liquide, vous risquez de perdre un peu lors de la vente compte tenu du spread entre achat et vente. Vous aurez alors plutôt intérêt à la conserver jusqu’au terme.

Comparez les rendements sur la base du prix de revente pour tenir compte du spread bid-ask.

Après une forte baisse des taux

Imaginons un autre scénario. Vous avez acheté une obligation plutôt longue (10 ans par exemple). Les taux d'intérêt ont fortement chuté depuis, faisait grimper le prix des obligations, dont la vôtre. Faut-il vendre pour autant ? Tout dépend de vous. Certains seront investisseurs heureux d’empocher la plus-value.

Le point important à regarder, c’est le rendement à maturité.

Si on vendait pour vous, par erreur, cette obligations, auriez-vous envie de la racheter aujourd’hui ?

Si le rendement à maturité reste correct et si vous n'avez pas de meilleure alternative, vous la rachetieriez probablement : alors conservez-la. Sinon, vous feriez mieux de la vendre.

Lorsque vous avez des doutes sur la capacité de remboursement de l’émetteur.

Les obligations sont soumises au risque de défaut : si l’émetteur est dans l’incapacité de payer, vous ne percevrez pas forcément les intérêts ou le capital.

Il peut sembler prudent de vendre dès que vous avez un doute, néanmoins, n’oubliez pas que le marché est raisonnablement efficient, et si vosu avez une information, les autres participants l’ont probablement aussi : le prix tient compte du risque.

Il est donc probable que le rendement actuariel de l’obligation ait augmenté (que le prix ait baissé). En vendant, vous réalisez une moins-value. En conservant, vous profitez d'un rendement actuariel supérieur.

Le rendement compense-t-il le risque ? A vous de juger.

Tout est affaire de couple rendement/risque.

Selon votre tolérance au risque, il peut être tout à fait raisonnable de vous débarrasser d’une obligation qui dont le risque est trop élevé pour vous.

Lorsque vous trouvez mieux ailleurs

Vous pouvez vendre des obligations pour acheter un autre actif, actions, immobilier, fonds monétaire…

Les obligations étant généralement contre-cyclique vis à vis des actions, elles auront souvent pris beaucoup de valeur pendant une forte baisse des actions. Cela peut donc être une opportunité de vendre les obligations (en plus-value) et d’acheter des actions (qui ont baissé entre temps). C’est le cas idéal, celui d’un rebalancement de portefeuille vertueux dans un portefeuille diversifié.

Attention : si les nouvelles émissions obligataires se font à un taux plus élevé, il est inutile de vendre vos obligations anciennes pour acheter des nouvelles. En effet, le prix que vous tirerez de vos anciennes obligations s’est ajusté pour tenir compte de ce moindre taux. A tout instant, toutes les obligations d’un même émetteur avec une même maturité payent le même taux actuariel.

Par exemple, si vous détenez des obligations 3% Banque XYZ 2030, et que la banque XYZ annonce l’émission d’obligations nouvelles à 5%, ne cherchez pas à vendre les vôtres pour acheter des nouvelles. Leur prix a baissé et elles rapportent désormais 5% sur le cours actuel. Ce sujet a été traité dans la question "Vendre des obligations à taux faible pour acheter des obligations à taux supérieur".

Lorsque les obligations prennent trop de place dans votre portefeuille

Dans le cadre d’un portefeuille diversifié, on répartit le patrimoine en diverses classes d’actifs : actions, obligations, monétaire, immobilier, matières premières, cryptos, etc.

La bonne pratique consiste à fixer des pourcentages pour chaque classe d’actif, et à rebalancer régulièrement le portefeuille (dont les poids varient au gré des marchés) afin de conserver une répartition conforme à celle souhaitée.

Après une forte baisse des taux, les obligations ont pu grimper fortement. Il est alors pertinent de vendre une partie des obligations pour racheter les actifs dont le poids a baissé.

Ce n’est pas faire du market timing ou anticiper le marché, c’est simplement conserver un risque constant dans le portefeuille.

Et comme les choses sont bien faites, après une hausse est justement le moment où le taux actuariel des obligations est faible. Autrement dit, après une forte hausse, elles ont épuisé une grande partie de leur potentiel.

Lorsque vous anticipez une hausse des taux

C’est bien connu : lorsque les taux montent, les obligations baissent. Il peut donc sembler raisonnable de vendre ses obligations lorsque les taux s’apprêtent à monter.

Toutefois, attention aux nuances :

  • Le marché est plutôt efficient. Si votre anticipation de hausse est consensuelle, c'est-à-dire si le reste du marché (économistes, traders, gérants institutionnels...) anticipe la même chose que vous, alors votre anticipation ne sert à rien. Si les taux montent à hauteur des anticipations, vos obligations ne baisseront pas. Vous vous en serez débarrassé pour rien.

  • La plupart des classes d’actifs (actions, immobilier) ont tendance à baisser lorsque les taux montent. Par conséquent, si vous espérez acheter ce type de titres, n'anticipez pas qu'ils montent lorsque les taux montents. Le pire scénario serait d’aller sur une classe d’actifs qui baisse davantage que vos obligations…

Dans une stratégie "Riding the curve"

Cette stratégie consiste à :

  • acquérir des obligations sur une maturité de la courbe des taux offrant une bonne rémunération
  • conserver ces obligations jusqu'à ce que leur taux actuariel ait baissé, du fait de la pente de la courbe des taux (plus le temps passe, plus la maturité se réduit)
  • vendre les obligations et racheter des obligations à taux supérieur

Les explications ici

En pratique, cela revient à conserver une duration presque constante. C'est une stratégie implicitement réalisée par les OPCVM obligataires, même si ce n'est pas leur mandat exact.