Comme le dit le fameux adage des marchés financiers : « il n’y a pas de repas gratuit »… tout investissement qui peut faire gagner de l’argent peut aussi en faire perdre !
Investir dans des obligations expose l’investisseur à un ou plusieurs des risques suivants :
- Risque de taux d’intérêt
- Risque de réinvestissement
- Risque de call (rachat anticipé)
- Risqie de défaut
- Risque d’inflation
- Risque de change
- Risque de liquidité
- Risque de volatilité
- Risque sur la structuration
Le risque de taux d’intérêt, ou risque de marché
Le prix d’une obligation varie à l’inverse des mouvements des taux d’intérêt : lorsque les taux d’intérêt montent, le prix des obligations baisse. Lorsque les taux d’intérêt baissent, le prix des obligations monte.
Ainsi, si vous achetez une obligation à taux fixe, et que vous la renvendez avant son échéance, vous êtes dépendant des mouvements de taux d’intérêt. Selon leur évolution depuis l’achat de l’obligation, ils peuvent occasionner une hausse ou une baisse des cours.
C’est le risque principal du marché obligataire, et de loin (mais c’est aussi une opportunité pour l’investisseur qui n’est pas buy & hold mais plutôt actif).
La sensibilité du cours d’une obligation aux taux d’intérêt n’est pas homogène. Elle dépend des caractéristiques de l’obligation, comme son coupon ou sa maturité, mais aussi du niveau des taux d’intérêt. Elle dépend aussi de facteurs optionnels potentiellement inclus dans l’obligations (refixation périodique du taux, options…). Les obligations les plus sensibles à une hausse des taux sont les obligations de maturité résiduelle longue à coupon faible. Une obligation zéro coupon à horizon 50 ans est extrêmement sensible !
En savoir plus sur les notions de sensibilité aux taux.
Le risque de réinvestissement
Le calcul de taux actuariel d’une obligation part du principe que les coupons sont réinvestis jusqu’à l’échéance de l’obligation. Le revenu de ce réinvestissement (les intérêts sur les intérêts en queqlue sorte) dépend des taux d’inérêt en vigueur au moment du versements des coupons. Si les coupons sont perçus dans un environnement de taux bas, le taux actuariel de l’opération d’investissement sera plus faible que prévu.
Ce risque peut sembler mineur. Néanmoins, à très long terme, le gain d’un portefeuille obligataire est majoritairement constitué des intérêts sur intérêts obligataires. Ce risque est donc important.
Ce risque dépend de la durée d’une obligation (plus elle est longue, plus le risque est important) et du montant des coupons versés (plus ils sont importants, plus le réinvestissement est un enjeu). Les obligations zéro-coupon ne sont pas concernées car il n’y a rien à réinvestir.
Ce risque se manifeste lorsque les taux sont bas, ou du moins lorsqu’ils ont baissé depuis l’achat de l’obligation. Ainsi, il est opposé au risque de taux d’intérêt : l’un et l’autre se compensent. Il existe des stratégies destinées à tirer profit de ce phénomène : ce sont les stratégies d’immunisation.
Le risque de call
Certaines obligations ont une clause permettant à l’émetteur de les rembourser par anticipation. L’émetteur insère en général cette clause pour pouvoir racheter ses obligations si les taux d’intérêt baissent et que les taux de l’obligation deviennent, en comparaison, trop élevés.
C’est évidemment une mauvaise nouvelle du point de vue de l’investisseur, pour plusieurs raisons :
- l’incertitude sur la maturité de l’obligation empêche toute prévision fiable de cash flows (l’investisseur peut avoir à réinvestir une somme en cours de route, et probablement dans un environnement de taux bas)
- l’obligation sera toujours une « mauvaise affaire », car son taux facial sera en ligne avec le marché, jamais bien supérieur (sinon l’émetteur la rachète)
- parce que les investisseurs savent qu’ils courent le risque de call, le cours de l’obligation peinera à dépasser sa valeur de rachat. Par conséquent, la probabilité de réaliser une plus-value à la revente en cours de vie est faible.
L’existence de calls est toujours bien décrite dans les documents légaux de l’obligation (Prospectus). C’est pourquoi il est important de systématiquement les lire !
En règle générale, un obligation qui ne parvient pas à dépasser le pair est un signe suspect qu’il convient d’investiguer…
Petit aparté : Quittons un moment le monde des obligations.
Les crédits immobiliers des particuliers ont un mécanisme proche du call émetteur. L’emprunteur a la faculté de renégocier le taux, c’est-à-dire de réaliser un remboursement anticipé de son prêt en finançant ce dernier par un nouvel emprunt à taux plus faible. Pour une banque, c’est un très gros risque qui se manifeste lorsque les taux baissent. Elle se couvre sur le marché contre ce risque en utilisant des produits qui « gagnent » lorsque les taux baissent.
Le risque de défaut, ou risque de crédit
Ce risque désigne le risque que l’émetteur de l’obligation fasse défaut, c’est-à-dire soit incapable d’assurer financièrement le paiement des coupons ou du nominal. Le défaut peut entraîner la liquidation de l’entreprise, c’est-à-dire la cession de tout son patrimoine afin de rembourser les créanciers. Compte tenu des règles de priorité, il est rare que les créanciers obligataires récupèrent totalement « leurs billes ». On parle de « taux de recouvrement » (recovery rate) pour désigner la proportion que les créanciers obligataires récupèrent en cas de faillite et de liquidation.
La présence du risque de défaut est la raison pour laquelle les obligations privées s’échangent avec une décote proportionnellle à leur risque perçu.
Les obligations d’Etat, jugées les plus sûres, constituent la référence du marché. Les obligations privées, un peu moins sûres, s’échangent un peu moins cher, et donc présentent un taux plus élevé pour l’acheteur. Les obligations privées les plus risquées (le segument « high yield », ou haut rendement – spéculatif) émises par des entreprises fragiles sont encore plus décotées et encore plus rentables, si toutefois elles remboursent. La loi de l’offre et de la demande régit cette hiérarchie. Mais parfois, le marché se trompe…
Le risque de défaut peut être estimé grâce à une analyse financière des comptes de l’entreprises. Contrairement à une analyse actions, on s’intéressera alors plutôt à la solvabilité de l’entreprise qu’à sa profitabilité ou sa croissance. Les critères imporants sont l’encours de la dette, la génération de cash flows, les actifs mobilisables…
Certaines obligations dites « sécurisées » ou « collatéralisées » sont assorties de garanties portant sur des actifs spécifiques. Par exemple, une partie du parc immobilier est juridiquement cantonnée et destinée à être cédée pour rembourser les obligations en cas de besoin. Cela réduit énormément le risque de défaut (mais retire des actifs pour les créanciers obligataires non sécurisés). Le marché étant relativement efficient, ces obligations ont généralement des taux plus bas.
Les agences de notation sont des organismes spécialisés dans la notation de la solvabilité financière des entreprises. Standard&Poor’s, Moody’s et Fitch sont les principales.
Le risque d’inflation
L’inflation désigne l’augmentation des prix des produits de consommation et des services au fil du temps. L’inflation entraîne une perte de pouvoir d’achat pour les détenteurs de capitaux. Sur le marché obligataire, le risque d’inflation existe parce que les coupons des obligations sont généralement fixes, exprimés en pourcentage. Une obligation peut payer des coupons de 100 € par an et être remboursée 5000 € dans 10 ans, mais nul ne connaît la valeur réelle de 5000 € dans 10 ans.
Si l’inflation augmente, le pouvoir d’achat lié aux revenus de l’obligation et au remboursement du capital chute.
Les obligations à taux fixe sont les plus affectées par le risque inflationniste. Les obligations zéro coupon le sont très fortement, puisque l’incertitude est maximale.
Les obligations à taux varible sotn moins affectées, car les taux sur lesquels elles sont indexées sont en général proches de l’inflation, via les mécanismes de fixation des taux directeurs par les banques centrales.
Il existe aussi des obligations indexées sur l’inflation : les intérêts et/ou le capital sont alors indexées sur un indice de prix qui représente l’inflation. Elles sont presque immunisées à ce risque.
Le risque de taux de change (risque de devise, forex risk, FX risk)
Les obligations libellées en devises autres que celles de l’investisseur rapportent des flux (coupon et remboursement de nominal) dont la valeur en euros est inconnue. Si la devise de l’obligation monte, le flux sera supérieur, si elle baisse, le flux sera inférieur. L’investisseur peut subir une déconvenue sur le montant des coupons, mais aussi une moins-value définitive au moment du remboursement si les taux de change ne sont pas allés en son sens.
Est-il possible de couvrir une obligation contre le taux de change ? Oui, mais cette couverture revient, peu ou prou, à échanger le taux d’intérêt de la devise de l’obligation contre le taux de la devise locale.
Autrement dit, si vous achetez une obligation en dollars à 5%, jugeant le taux intéressant face aux taux euro de 2%, une fois couverte, son taux reviendra proche de 2%. En effet, par des mécanismes d’arbitrages sur les marchés, le taux d’une couverture est égal au différentiel de taux à couvrir. Impossible d’échapper à ce risque !
Il n’y a pas de gain sans risque. Pour encaisser un taux étranger, il faut accepter le risque de change qui est lié.
Bien évidemment, cela fonctionne aussi dans l’autre sens. Acheter des obligations en devises peut être un moyen de « jouer » l’appréciation d’une devise que l’on considère sous-évaluée.
Le risque de liquidité
Ce risque désigne la facilité ou la difficulté à vendre une obligation dans un délai raisonnable, à un cours raisonnable. La principale mesure du risque de liquidité est le spread bid-ask, la fourchette achat-vente dans le carnet d’ordres. Plus cette fourchette est large, plus la liquidité est faible.
Le marché obligataire en Europe se traite surtout de gré à gré, c’est-à-dire entre investisseurs institutionnels, en signalant leurs intentions d’achat et de vente via Bloomberg ou des brokers spécialisés (qui n’ont rien à voir avec Boursorama), au téléphone. Le carnet d’ordres et les bourses sont assez peu utilisés. L’investisseur particulier est donc désavantagé, et subit un risque plus élevé que les investisseurs institutionels.
Pour l’investisseur qui a acheté dans l’optique de détenir l’obligation jusqu’à échéance en percevant les coupons, ce risque n’est pas un souci.
Le risque de volatilité
Ce risque, de second ordre, concerne les obligations qui ont des options intégrées. Par exemple, nous avons parlé plus haut des obligations munies de call émetteur, susceptibles d’être remboursées au pair au bon vouloir de l’émetteur.
Indépendamment du mouvement des taux d’intérêt, ces obligations sont pénalisées lorsque la volatilité augmente, puisque cela rend le call plus probable. A l’opposé, les obligations convertibles prennent de la valeur lorsque la volatilité augmente, puisque cela rend la conversion en action plus probable.
En règle générale, lorsque l’on vend des options, on a intérêt à ce que la volatilité baisse ou reste stable. Lorsque l’on achète des options, on a intérêt à ce qu’elle augmente.
Le risque de structuration
Ce risque un peu fourre-tout doit être mentionné par prudence. C’est le risque de « mauvaies compréhension » d’une obligation trop structurée.
Il ne concerne pas que le novice. Il s’applique tout aussi bien aux salles des marchés et aux investisseurs professionnels. La crise des subprimes l’a montré : lorsqu’une obligation est trop complexe, on ne peut pas forcément tout comprendre. Il peut exister des mécanismes ou des configurations économiques qui les mettent en défaut.
Restez simples !
Les risques liés à l’environnement économique, juridique et financier
Enfin, il exsite une multitude d’autres risques qui peuvent affecter l’investisseur ou l’environnement dans lequel il opère. Par exemple :
- la modification de la fiscalité des obligations (fin de la flat tax, retour au barème obligatoire…), l’augmentation des prélèvements sociaux
- les changements de traitement des obligations dans les ratios réglementaires bancaires et assurantiels, qui peuvent causer un moindre appétit de ces institutions pour les obligations et donc des baisses de cours liées aux ventes ou à la moindre participation aux émission
- les réhaussements de taux des produits réglementés (Livret A, PEL…) pour des raisons politiques, qui rendent les obligations non compétitives. Les hausses de taux de ces produits liées aux taux d’intérêt sont liées au risque de taux déjà évoqué. Le risque est un « coup de pouce ».
- les modifications des règles sur les prêts immobiliers, qui pourraient changer la typologie des obligations émises par les banques.
En règle générale, l’investisseur particulier doit s’intéresser à sa propre fiscalité et à sa propre organisation patrimoniale pour minimiser les risques sur lesquels il a la main, mais il est illusoire de vouloir se protéger contre tosu les rsiques. Une obligation doit idéalement être acquise pour être conservée jusqu’à échéance : cela annule de nombreux risques.