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Les risques de l'investissement en obligations

par : Robin des bonds

Comme le dit le fameux adage des marchés financiers : « il n’y a pas de repas gratuit »… tout investissement qui peut faire gagner de l’argent peut aussi en faire perdre !

Investir dans des obligations expose l’investisseur à un ou plusieurs des risques suivants :

  • Risque de défaut
  • Risque de taux d’intérêt
  • Risque de réinvestissement
  • Risque de call (rachat anticipé)
  • Risque d’inflation
  • Risque de change
  • Risque de liquidité
  • Risque de volatilité
  • Risque sur la structuration

Le risque de défaut, ou risque de crédit

Ce risque désigne le risque que l’émetteur de l’obligation fasse défaut, c’est-à-dire soit incapable d’assurer financièrement le paiement des coupons ou du nominal. Le défaut peut entraîner la liquidation de l’entreprise, c’est-à-dire la cession de tout son patrimoine afin de rembourser les créanciers.

Compte tenu des règles de priorité, il est rare que les créanciers obligataires récupèrent « leurs billes ». On parle de « taux de recouvrement » (recovery rate) pour désigner la proportion que les créanciers obligataires récupèrent en cas de faillite et de liquidation.

Le risque de défaut est la raison pour laquelle deux obligations de même maturité n'ont pas le même taux actuariel : les obligations s’échangent avec une décote proportionnelle à leur risque perçu.

Les obligations d’État (souveraines), jugées les plus sûres, constituent la référence du marché. Cependant, tout dépend de l'État. Les émetteurs les plus sûrs (États-Unis, Allemagne, Suisse...) ne se comparent pas aux émetteurs plus risqués (Argentine, Pakistan...)

Les obligations privées sont tout aussi variées que les obligations souveraines. Le segment le plus sûr est "Investment Grade" (qualité d'investissement), entreprises dont le remboursement est assez sûr.

Les obligations privées les plus risquées (le segment « high yield », ou haut rendement – spéculatif) émises par des entreprises fragiles sont encore plus décotées et encore plus rentables, si toutefois elles remboursent.

Le risque de défaut peut être estimé grâce à une analyse financière des comptes de l’entreprise. Contrairement à une analyse actions, on s’intéressera alors plutôt à la solvabilité de l’entreprise qu’à sa profitabilité ou sa croissance. Les critères importants sont l’encours de la dette, la génération de cash flows, les actifs mobilisables…

Certaines obligations dites « sécurisées » ou « collatéralisées » sont assorties de garanties portant sur des actifs spécifiques. Par exemple, une partie du parc immobilier est juridiquement cantonnée et destinée à être cédée pour rembourser les obligations en cas de besoin. Cela réduit énormément le risque de défaut (mais retire des actifs pour les créanciers obligataires non sécurisés). Le marché étant relativement efficient, ces obligations ont généralement des taux plus bas.

À l'opposé, les obligations subordonnées ou TSDI sont structurées de façon à être plus risquées, et plus rémunératrices.

Les agences de notation sont des organismes spécialisés dans la notation de la solvabilité financière des entreprises. Standard & Poor’s, Moody’s et Fitch sont les principales.

Le risque de taux d’intérêt, ou risque de marché

Le prix d’une obligation varie à l’inverse des mouvements des taux d’intérêt : lorsque les taux d’intérêt montent, le prix des obligations baisse. Lorsque les taux d’intérêt baissent, le prix des obligations monte.

Ainsi, si vous achetez une obligation à taux fixe, et que vous la renvendez avant son échéance, vous êtes dépendant des mouvements de taux d’intérêt. Selon leur évolution depuis l’achat de l’obligation, ils peuvent occasionner une hausse ou une baisse des cours.

C’est le risque principal du marché obligataire, et de loin (mais c’est aussi une opportunité pour l’investisseur qui n’est pas buy & hold mais plutôt actif).

La sensibilité du cours d’une obligation aux taux d’intérêt n’est pas homogène. Elle dépend des caractéristiques de l’obligation, comme son coupon ou sa maturité, mais aussi du niveau des taux d’intérêt. Elle dépend aussi de facteurs optionnels potentiellement inclus dans l’obligation (refixation périodique du taux, options…). Les obligations les plus sensibles à une hausse des taux sont les obligations de maturité résiduelle longue à coupon faible. Une obligation zéro coupon à horizon 50 ans est extrêmement sensible !

En savoir plus sur les notions de sensibilité aux taux.

Le risque de réinvestissement

Le calcul de taux actuariel d’une obligation part du principe que les coupons sont réinvestis jusqu’à l’échéance de l’obligation. Le revenu de ce réinvestissement (les intérêts sur les intérêts en quelque sorte) dépend des taux d’intérêt en vigueur au moment du versement des coupons. Si les coupons sont perçus dans un environnement de taux bas, le taux actuariel de l’opération d’investissement sera plus faible que prévu.

Ce risque peut sembler mineur. Néanmoins, à très long terme, le gain d’un portefeuille obligataire est majoritairement constitué des intérêts sur intérêts obligataires. Ce risque est donc important.

Ce risque dépend de la durée d’une obligation (plus elle est longue, plus le risque est important) et du montant des coupons versés (plus ils sont importants, plus le réinvestissement est un enjeu). Les obligations zéro-coupon ne sont pas concernées car il n’y a rien à réinvestir.

Ce risque se manifeste lorsque les taux sont bas, ou du moins lorsqu’ils ont baissé depuis l’achat de l’obligation. Ainsi, il est opposé au risque de taux d’intérêt : l’un et l’autre se compensent. Il existe des stratégies destinées à tirer profit de ce phénomène : ce sont les stratégies d’immunisation.

Le risque de call

Certaines obligations ont une clause permettant à l’émetteur de les rembourser par anticipation. L’émetteur insère en général cette clause pour pouvoir racheter ses obligations si les taux d’intérêt baissent et que les taux de l’obligation deviennent, en comparaison, trop élevés.

C’est évidemment une mauvaise nouvelle du point de vue de l’investisseur, pour plusieurs raisons :

  • l’incertitude sur la maturité de l’obligation empêche toute prévision fiable de cash flows (l’investisseur peut avoir à réinvestir une somme en cours de route, et probablement dans un environnement de taux bas)
  • l’obligation sera toujours une « mauvaise affaire », car son taux facial sera en ligne avec le marché, jamais bien supérieur (sinon l’émetteur la rachète)
  • parce que les investisseurs savent qu’ils courent le risque de call, le cours de l’obligation peinera à dépasser sa valeur de rachat. Par conséquent, la probabilité de réaliser une plus-value à la revente en cours de vie est faible.

L’existence de calls est toujours bien décrite dans les documents légaux de l’obligation (Prospectus). C’est pourquoi il est important de systématiquement les lire !

En règle générale, une obligation qui ne parvient pas à dépasser le pair est un signe suspect qu’il convient d’investiguer…

Petit aparté : Quittons un moment le monde des obligations.
Les crédits immobiliers des particuliers ont un mécanisme proche du call émetteur. L’emprunteur a la faculté de renégocier le taux, c’est-à-dire de réaliser un remboursement anticipé de son prêt en finançant ce dernier par un nouvel emprunt à taux plus faible. Pour une banque, c’est un très gros risque qui se manifeste lorsque les taux baissent. Elle se couvre sur le marché contre ce risque en utilisant des produits qui « gagnent » lorsque les taux baissent.

Le risque d’inflation

L’inflation désigne l’augmentation des prix des produits de consommation et des services au fil du temps. L’inflation entraîne une perte de pouvoir d’achat pour les détenteurs de capitaux. Sur le marché obligataire, le risque d’inflation existe parce que les coupons des obligations sont généralement fixes, exprimés en pourcentage. Une obligation peut payer des coupons de 100 € par an et être remboursée 5000 € dans 10 ans, mais nul ne connaît la valeur réelle de 5000 € dans 10 ans.

Si l’inflation augmente, le pouvoir d’achat lié aux revenus de l’obligation et au remboursement du capital chute.

Les obligations à taux fixe sont les plus affectées par le risque inflationniste. Les obligations zéro coupon le sont très fortement, puisque l’incertitude est maximale.

Les obligations à taux variable sont moins affectées, car les taux sur lesquels elles sont indexées sont en général proches de l’inflation, via les mécanismes de fixation des taux directeurs par les banques centrales.

Il existe aussi des obligations indexées sur l’inflation : les intérêts et/ou le capital sont alors indexés sur un indice de prix qui représente l’inflation. Elles sont presque immunisées à ce risque.

Le risque de taux de change (risque de devise, forex risk, FX risk)

Les obligations libellées en devises autres que celles de l’investisseur rapportent des flux (coupon et remboursement de nominal) dont la valeur en euros est inconnue. Si la devise de l’obligation monte, le flux sera supérieur, si elle baisse, le flux sera inférieur. L’investisseur peut subir une déconvenue sur le montant des coupons, mais aussi une moins-value définitive au moment du remboursement si les taux de change ne sont pas allés en son sens.

Est-il possible de couvrir une obligation contre le taux de change ? Oui, mais cette couverture revient, peu ou prou, à transformer la devise de l’obligation en euros. Les taux d’intérêt des deux devises étant rarement identiques, cela retire en grande partie l’intérêt de détenir une obligation dans une autre devise.

Ce risque est plus important pour les obligations d’entreprises d’États émergents, qui s’échangent souvent dans des devises sujettes à de fortes variations, et surtout à des dépréciations.

Le risque de liquidité

Le risque de liquidité désigne le risque qu’un investisseur soit dans l’impossibilité de céder son obligation au prix du marché. Les raisons de l’illiquidité peuvent être variées :

  • il y a très peu d’acheteurs
  • l’obligation a été émise par une entreprise peu connue
  • le marché est très tendu
  • les titres détenus sont spécifiques (dette mezzanine, par exemple)

La liquidité est en général faible pour les obligations privées, surtout en France. En conséquence, la transaction des obligations entre investisseurs passe souvent par un courtier qui se rémunère via un spread (l’écart entre prix d’achat et prix de vente). Le spread peut représenter plusieurs dizaines de points de base, et est proportionnel au risque de liquidité de l’obligation. En ce sens, la liquidité est un risque immédiat pour l’investisseur qui peut occasionner des moins-values.

Ce risque est aussi particulièrement pernicieux en période de crise ou de tension financière. On a souvent vu des fonds obligataires suspendre leurs achats ou leurs rachats en raison d’un manque de liquidité, laissant ainsi leurs souscripteurs dans l’incapacité de récupérer leur argent.

L’illiquidité est exacerbée par la complexité des obligations, d’où la nécessité de travailler avec des partenaires expérimentés, capables de donner des prix fermes et d’intervenir dans les situations difficiles. C’est une expertise rare et précieuse, car une obligation illiquide peut devenir une épine dans le pied, bloquant ainsi toute stratégie de gestion active.

Le risque sur la structuration

Certaines obligations sont structurées de manière complexe, incluant des options, des clauses de conversion, ou des mécanismes de remboursement spécifiques. Ces structures complexes peuvent introduire des risques additionnels :

  • Risque de conversion : les obligations convertibles peuvent être échangées contre des actions de l’émetteur à des conditions préétablies. Ce mécanisme peut introduire une volatilité supplémentaire en fonction du prix des actions sous-jacentes.
  • Clauses de remboursement anticipé : certaines obligations permettent à l'émetteur de rembourser avant l'échéance. Ce remboursement anticipé, souvent lié à la baisse des taux d'intérêt, peut désavantager l'investisseur.
  • Produits dérivés intégrés : certains titres peuvent inclure des dérivés, ajoutant une couche supplémentaire de complexité et de risque.

Les investisseurs doivent comprendre ces mécanismes et évaluer les risques associés avant d’investir dans des obligations structurées.