Types d'obligations : comment les classer ?

Les obligations sont des titres de créance, mais elles recouvrent en réalité une diversité bien plus large qu’on ne l’imagine.
Il ne s’agit pas seulement de choisir une "obligation à 10 ans" ou une "obligation d’État" : chaque obligation a une nature spécifique, qui détermine son comportement, ses risques et son rôle dans un portefeuille.
Voici une grille de lecture en quatre axes pour s’y retrouver.
1. Le classement par type d’émetteur
L’émetteur est celui qui vous doit de l’argent. Il détermine le risque de crédit, la fiscalité et parfois l’accès à l’obligation.
Obligations d’État
Émises par les gouvernements, elles sont considérées comme les plus sûres d’un point de vue crédit. Leurs rendements sont généralement faibles mais stables.
Émises par des États et émises dans la devise en vigueur du pays en question, elles sont généralement très sûres lorsqu'ils s'agit de pays de premier plan. On considère même que le taux de ces obligations définit le taux sans risque du pays.
Les pays les plus fragiles émettent parfois en dollars afin d'attirer davanage d'investisseurs.
Certains obligations, sans pour autant être souveraines, présentent également de très fortes garanties : obligations émises par des entités supranationales (Fonds Monétaire International, Banque Européenne d'Investissement...) ou par des régions ou municipalités par exemple.
Les obligations publiques ou parapubliques servent de socle dans la plupart des portefeuilles prudents.
Aux Etats-Unis, les "munis" sont très populaires car exonérés d’impôts. En France, nous n'avons pas cet équivalent.
Obligations d’entreprises
Elles financent les besoins des entreprises, cotées en bourse ou non. Leur rendement est plus élevé que celui des souveraines, mais le risque de défaut est supérieur. On distingue celles les plus sûres (investment grade, de qualité d'investissement) et celles plus risquées (high yield, haut rendement), généralement en s'aidant des notations de crédit des agences pour estimer le risque.
Obligations bancaires et assurantielles
Les banques et les assureurs sont des émetteurs "corporate" un peu particuliers. En effet, ces secteurs sont soumis à des fortes contraintes de bilan (leur solvabilité est encadrée par les autorités) et les émissions obligataires sont souvent calibrées pour répondre à des besoins très techniques. Par conséquent, on ne les considère généralement pas de la même façon qeu les obligations d'entreprises industrielles ou commerciales classiques.
Les obligaitons bancaires ou assurantielles peuvent être structurées de manière complexe. Les obligations subordonnées ou hybrides supportent un risque plus élevé, mais offrent souvent des coupons attractifs. Elles sont courantes dans les stratégies de rendement élevé.
2. Le classement par structure financière
Une obligation peut être simple ou très sophistiquée. Sa structure détermine comment elle vous rémunère… et ce qui peut se passer en cas d’imprévu.
Obligation à taux fixe
L’investisseur connaît à l’avance les montants qu’il percevra à chaque échéance. C’est la structure la plus lisible et la plus fréquente. Elles sont sensibles aux variations des taux d’intérêt.
Implicitement, lorsque l'on parle d'obligations, on sous-entend des obligations à taux fixe.
Obligation à taux variable ou révisable
Le coupon de ces obligations n'est pas constant au fil des ans. Il dépend d'un taux de référence, par exemple le taux Euribor 12 mois (ce taux est un taux interbancaire : il représentent le taux auquel les banques se prêtent entre elles) à laquelle on ajoute une marge fixe (par exemple +1,5 %).
En achetant une obligation à taux variable indexées Euribor 12 mois, le coupon que vous percevez sera recalculé chaque année en fonction de la valeur du taux de référence. Si les taux Euribor montent, vous toucherez un coupon plus élevé. S'ils baissent, votre coupon sera plus faible.
À terme, vous récupérez votre capital comme avec une obligation classique.
Ces obligations sont utiles pour les investisseurs qui anticipent une hausse des taux et qui acceptent d'avoir des revenus fluctuant au fil des ans.
Elles sont moins volatiles que les obligations à taux fixe, car elles ne sont jamais décorrélées des taux de marché.
Voir notre article dédié sur les obligations à taux variable.
Obligation Zéro coupon
Ces obligations ne versent aucun intérêt. Leur seul flux financier est le remboursement du capital, à montant connu et date connue. Ces obligations s'achètent donc systématiquement avec décote puisque le gain n'est pas fait sous forme de perception d'intérêts, mais de plus-value à terme (ou en revendant en cours de vie).
Elles sont très sensibles à la variation des taux (durée longue), et sont utiles fiscalement car les gains sont capitalisés plutôt que distribués.
Voir notre article dédié sur les obligations zéro coupon.
Obligations indexées sur l’inflation
Le capital et/ou les coupons sont ajustés en fonction d’un indice de prix. Elles préservent le pouvoir d’achat de l’épargnant. Peu courantes, mais très utiles dans un contexte inflationniste.
Voir notre article dédié sur les obligations indexées sur l'inflation.
Obligations perpétuelles
Ces obligations n'ont pas de date de remboursement fixe. Lorque vous achetez une telle obligation, vous percevez les coupons jusqu'à la fin de vos jours... Ou jusqu'au défaut de l'émetteur. Elles ont généralement des clauses de rappel (call) par l’émetteur.
Voir notre article dédié sur les obligations perpétuelles.
Obligations subordonnées
La subordination est un principe financer qui consiste à créér un ordre de remboursement entre obligations : des rangs. Il existe typiquement le rang senior (le plus sûr, remboursé en premier) et le rang junior (remboursé uniquement lorsque les obligations senior ont été remboursées).
Une obligation subordonnée est une obligation qui n'est remboursée que si l'entreprise en a les moyens, ou selon des critères particuliers tels que sa santé financière. Parfois même, les coupons sont suspendus si l'émetteur ne peut pas les payer.
Ces obligations sont beaucoup plus risquées que les obligations classiques. En contrepartie, elles versent des coupons plus élevées.
Elles sont souvent utilisées par les banques pour renforcer leurs fonds propres. En cas de défaut, elles sont remboursées après les obligations senior, mais avant les actions.
Elles sont souvent notées en dessous de la note d'investissement (investment grade) et sont donc considérées comme des obligations à haut rendement (high yield).
Les obligations sécurisées
Il s'agit d'obligations dont le remboursement est garanti par le cloisonnement d'actifs dédiés, tels qu'un parc immobilier. Elles sont en quelque sorte "super-senior" et sont remboursées avant les autres créances en cas de liquidation de l'émetteur.
Par exemple, une entreprise fragile peut sécuriser son émission obligataire grâce à un immeuble. Si elle ne peut pas rembourser ses obligations et doit être mise en liquidation, les créanciers obligataires ont un droit prioritaire sur les immeubles, ce qui leur offre une garantie supplémentaire.
Bien entendu, cette sécurité se manifeste par des coupons moins élevés.
Obligations convertibles
Elles peuvent être transformées en actions de l’émetteur selon certaines conditions. Cela crée un profil hybride entre obligation et action, intéressantes dans une logique de pari sur la hausse du cours avec un amortisseur de sécurité. Elles sont souvent émises par des entreprises en forte croissance, qui cherchent à attirer des investisseurs tout en préservant leur flexibilité financière.
Voir notre article dédié sur les obligations convertibles.
Obligations callables / Obligations puttables
L’émetteur (callable) ou plus rarement le porteur (puttable) peut exiger un remboursement anticipé. Cela ajoute (respectivement, réduit) un risque de réinvestissement pour l’investisseur. Ce type de clause modifie le rendement effectif et la duration réelle.
Voir notre article dédié sur le call (clause de rappel anticipé).
3. Le classement par maturité
La maturité est l’échéance contractuelle de remboursement. Elle influe sur le rendement, la sensibilité aux taux et la visibilité du placement.
Obligations à maturité courte (< 2 ans)
Faible volatilité, faible rendement. Pratique pour stocker de la liquidité ou les besoins à court terme. Elles servent d'alternative aux fonds monétaires ou aux livrets.
Obligations à maturité moyenne (2 à 7 ans)
Équilibre entre rendement et visibilité. Ce sont souvent les maturités privilégiées dans les portefeuilles diversifiés. Moins sensibles aux mouvements de taux que les longues.
Obligations à maturité longue (> 7 ans)
Offrent des rendements supérieurs, mais plus de volatilité. Exposées à des risques de taux plus importants. Intéressantes si l’on anticipe une baisse des taux.
Obligations très longues ou perpétuelles
Pas de remboursement prévu ou remboursement très éloigné. Le risque de duration est maximal. Ce sont des instruments pour investisseurs expérimentés.
4. Le classement par usage dans un portefeuille
Ce classement utilitaire est centré sur l’objectif de l’investisseur. Moins technique diront les puristes, mais c’est souvent le plus parlant. Dans quel but j'achète cette obligation ?
Revenu régulier
Les obligations à coupon fixe ou variable apportent des flux prédictibles. Utile pour compléter une retraite ou équilibrer des revenus irréguliers. L’approche « rente » repose sur ce type de titres.
Protection contre l’inflation
Certaines obligations protègent le pouvoir d’achat grâce à des coupons indexés. Elles permettent de ne pas perdre en valeur réelle sur le long terme. À privilégier dans un contexte de hausse des prix durable.
Diversification prudente
En complément d’un portefeuille actions, les obligations apportent stabilité et protection. Les obligations souveraines bien notées jouent ce rôle. Elles amortissent les périodes de volatilité des marchés.
Recherche de rendement
Les investisseurs peuvent viser des obligations plus risquées mais plus rémunératrices. High yield, subordonnées, perpétuelles : le rendement monte avec le risque. Il faut alors bien analyser le crédit de l’émetteur.
Pari sur les taux d’intérêt
Les obligations sont sensibles aux mouvements de taux. Les zero coupon ou longues maturités amplifient ces effets. On peut donc construire une stratégie directionnelle ou de portage.
Optimisation fiscale ou successorale
Selon l’enveloppe (assurance-vie, compte-titres), ou la fiscalité des coupons, certaines obligations sont plus avantageuses. Elles peuvent aussi être utilisées en démembrement ou donation. C’est un levier à part entière dans une stratégie patrimoniale.
5. Par mode d'acquisition
Enfin, on peut aussi classer l'investissement en obligations selon le produit que l'on utilise réellement.
Est-ce une obligation en direct ? Un fonds d'investissement composé d'obligations ? Un fonds en euros ? Un fonds obligataire à échéance ?
Obligation en direct
Vous achetez une obligation précise avec un émetteur, un coupon, une maturité. L'investissement est clair et vous savez ce que vous détenez. Mais il faut diversifier, ce qui n’est pas toujours simple. Et parfois, les montants minimum sont dissuasifs.
Fonds obligataire classique
Un gérant sélectionne des obligations pour le compte des investisseurs. Cela permet une large diversification même avec peu de capital, mais vous perdez la visibilité individuelle des lignes et la gestion est souvent trop coûteuse par rapport à sa valeur ajoutée.
Fonds obligataire à échéance
Simule un portefeuille obligataire figé, qui s’éteint à une date donnée. Utile pour des projets à horizon fixe. L’alternative la plus lisible à l’achat direct.
ETF obligataire
Suivent un indice obligataire de façon passive. Très liquides, peu chers, parfaits pour les portefeuilles longs termes. Moins adaptés aux stratégies d’arbitrage fines ou aux obligations atypiques.
Fonds en euros
Section à capital garanti dans les contrats d’assurance-vie. Largement investi en obligations. Rassurant, mais très peu transparent sur les actifs détenus. La rémunération est stabilisée au prix d’une mutualisation des performances.
Et bien d'autres !
Ne paniquez pas ces descriptions vous laissent perplexe. Ce qu'il faut retenir, c'est qu'il existe de très nombreux formats d'obligations, chacun présentant des risques particuliers mais aussi des opportunités.
Pour l'essentiel, vos obligations seront à taux fixe, senior et à maturité connue.
Mais ne soyez pas surpris si vous croisez des exceptions ! C'est ce qui fait la richesse de ce marché.

Nicolas Pérot
Ancien trader sur produits de taux d’intérêt et responsable des émissions obligataires de grandes entreprises, je partage ici mon expertise sur les obligations. Mon objectif ? Démystifier ce marché et apporter de la valeur à tous, du débutant à l’investisseur chevronné.
Ecrivez-moi(Afficher votre publicité ici ? Contactez-moi !)