Obligations : définition et fonctionnement
Terme en anglais : Bond
par : Robin des bonds
Qu'est-ce qu'une obligation ?
Les obligations sont des titres financiers émis par des entités telles que des entreprises et des gouvernements pour lever des fonds auprès des investisseurs.
Les obligations représentent une créance : l'émetteur (l'emprunteur) s'engage à :
- verser des intérêts (les coupons) périodiquement (annuels généralement),
- rembourser le capital à une date d'échéance convenue dans le contrat.
En achetant des obligations, vous percevez donc des intérêts et retrouvez votre capital à date connue.
Les obligations sont négociables sur les marchés financiers, comme des actions. Cela permet de les acquérir à des prix différents de leur valeur nominale ou de leur valeur de remboursement.
Le marché des obligations est très varié : il existe des obligations de toutes maturités (de 1 jours à 1 siècle), émises par des émetteurs très différents présentant différents niveau de risque, et donc de rendement.
L'essentiel
- Une obligation est un titre de créance, qui matérialise une dette émise par un emprunteur.
- Les obligations versent des intérêts réguliers.
- La plupart des obligations sont à taux fixe. Leurs cours sont inversement corrélés aux taux d'intérêts : lorsque les taux montent, les prix baissent et vice-versa.
- Les obligations ont une date de maturité à laquelle le capital doit être remboursé, sans quoi l'émetteur passe en défaut de paiement voire en faillite.
- Il existe beaucoup de types d'obligations : convertibles en actions, sans échéance, etc.
- Pour les particuliers, la façon la plus simple d'investir en obligations et de passer par un OPCVM ou un ETF.
Une obligation est une reconnaissance de dette
Au lieu d’emprunter à la banque, une entreprise peut emprunter auprès de personnes physiques comme vous et moi ou de personnes morales (assureurs, caisses de retraite, investisseurs institutionnels…). Les prêteurs lui apportent de l’argent et signent collectivement un contrat de prêt (en anglais, un bond, un engagement). L'entreprise doit payer des intérêts et restituer le cpaital à date fixée : c'est une émission d’obligations.
Pour matérialiser cet engagement, elle donne aux prêteurs une « obligation ». Les conditions de chaque obligation (taux d’intérêt perçu, échéance du prêt, fréquence des paiements…) sont propres à chaque émission.
Historiquement, des titres « papier » représentaient la créance : les prêteurs recevaient alors un certificat, une reconnaissance de dette, munis de coupons en papier à détacher sur le côté. Chaque année, les prêteurs découpaient les coupons en papier et les apportaient à la banque, qui les centralisaient pour les amener chez l’entreprise émettrice, qui versait l’argent des intérêts à la banque, qui les redistribuait chez ses clients.
Les titres étaient au porteur : la reconnaissance de dette n’est pas envers le prêteur initial mais envers le détenteur de l'obligation à un instant donné.
Cession avant l'échéance
On peut en effet revendre ses obligations avant l’échéance. Si on a acheté une obligation et qu’on a besoin d’argent à mi-course, sans pouvoir attendre, on peut trouver quelqu’un qui prendra le relais : les obligations peuvent se revendre en bourse entre le moment où elles sont émises et leur date d’échéance. L’entreprise n’a pas à donner son avis, tout ce à quoi elle s’est engagée, c’est de rembourser le possesseur du papier au terme.
Qui revend ? Des acheteurs de la première heure qui ont besoin de récupérer leur argent, ceux qui ont trouvé un taux plus intéressant ailleurs, ceux qui ne font plus confiance à l’entreprise pour payer les intérêts et rendre le capital… (voir : quand vendre ses obligations ?
Qui achète ? Des investisseurs qui ont laissé passer du temps parce qu’ils ne pouvaient bloquer leur argent que pendant 3 ans et non 5, et ceux qui trouvent qu’ils font un bon placement en rachetant ces obligations sur le marché secondaire, des arbitragistes…
Sur le marché primaire, on prête directement à l’émetteur de l’obligation. L’argent déboursé va à l’entreprise. Sur le marché secondaire, on prend le relais de quelqu’un d’autre. L’argent déboursé va de l’acheteur vers le vendeur. Le prix se négocie, des fois on vend plus cher qu’on a acheté, des fois moins cher.
Pour certaines obligations, comme les obligations d’État, l’immense majorité des échanges a lieu sur le marché secondaire. Pour d’autres, le marché secondaire est illiquide et tout se fait à l’émission.
Pour l’un ou pour l’autre, il faut passer par une banque ou un courtier (broker).
Le rôle des obligations dans l'économie
Les obligations jouent un rôle crucial dans le monde financier, car elles sont essentielles pour financer les gouvernements et les entreprises.
Le marché mondial des obligations est vaste, avec une capitalisation boursière dépassant les 128 000 milliards de dollars en 2023. Les obligations souveraines, émises par les gouvernements pour financer leurs déficits budgétaires et divers projets d'infrastructure, représentent environ 67 000 milliards de dollars, tandis que les obligations d'entreprises (ou corporate bonds), utilisées par les sociétés pour lever des fonds à des fins de croissance, de restructuration ou d'acquisitions, constituent près de 44 000 milliards de dollars du marché global.
À titre d'exemple, la capitalisation boursière mondiale du marché des actions s'élève à environ 100 000 milliards de dollars.
Le marché des obligations est donc similaire en taille à celui des actions. En terme de volumes traités, c'est le marché obligataire qui est le plus important avec des échanges quotidiens deux à trois fois supérieurs à ceux des actions, l'essentiel du volume étant porté par les obligations les plus liquides : les obligations d'État notamment des États-Unis. Les marchés obligataires sont souvent considérés comme l'épine dorsale des marchés financiers, puisque c'est eux qui déterminent le coût de l'argent.
Caractéristiques des obligations
Une obligation se caractérise principalement par :
- l'émetteur : c’est l’entité (entreprise, État, collectivité…) qui a émis la dette, et qui est en charge du paiement des intérêts et du remboursement
- la dénomination : c’est la valeur d’une obligation. Un émetteur peut par exemple émettre pour 10 millions d’euros d’obligations sous la forme de 10 000 obligations de 1 000 euros chacune.
- la date d’émission
- le taux d’intérêt des coupons (toujours exprimé en base annuelle, quelle que soit la périodicité des coupons) et sa périodicité (souvent annuelle en France, semestrielle aux États-Unis)
- la date de remboursement
- le montant de remboursement (qui peut être différent du pair)
- d'éventuelles conditions ou particularités
La plupart des obligations sont à taux fixe, à échéance connue, et remboursées en espèces. Il existe néanmoins de nombreuses variantes (obligations à taux variable, obligations perpétuelles, remboursables en actions…).
La plupart des obligations sont en remboursement in fine : tout le capital est remboursé au terme, contrairement aux crédits amortissables qui sont la norme dans les prêts bancaires.
Comme tout titre financier, une obligation porte un code qui permet de l’identifier au moment de passer un ordre en bourse, par exemple les codes ISIN sur Euronext et d'autres places boursières.
Les émetteurs d'obligations
Les émetteurs d'obligations sont très divers et comprennent les gouvernements, les entreprises, ainsi que les institutions supranationales.
Les obligations souveraines représentent la majorité des émissions, avec des pays comme les États-Unis, le Japon et la Chine émettant des volumes significatifs pour financer leurs budgets publics. En 2023, les États-Unis à eux seuls ont émis environ 22 000 milliards de dollars en obligations souveraines.
Les entreprises émettent également une part importante d'obligations pour lever des fonds. Le marché des obligations d'entreprises a atteint environ 44 000 milliards de dollars, avec des multinationales comme Apple, Microsoft et Amazon parmi les principaux émetteurs. Les institutions supranationales, telles que la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI), émettent des obligations pour financer des projets de développement à l'échelle mondiale, contribuant à une part notable de ce marché.
Mais les émissions obliagaires ne sont pas réservées aux grandes entreprises : des entreprises de taille plus modeste, cotées en bourse ou non, peuvent émettre des obligations.
Grâce à leur grande flexibilité, les obligations sont aussi un format juridique couramment utilisé pour créer des produits structurés ou des projets de financements participatif.
Les acheteurs d'obligations
Les obligations sont surtout achetées par les institutions financières : banques, compagnies d'assurance, fonds de pension...
Les banques achètent des obligations pour gérer leur liquidité et assurer une certaine stabilité à leur portefeuille d'actifs. Les compagnies d'assurance et les fonds de pension investissent massivement dans des obligations pour obtenir des rendements stables et sécurisés. Par exemple, un fonds de pension qui sait qu'il aura des pensions à verser pendant plusieurs décennies achète des obligations pour percevoir les intérêts qui lui permettront d'honorer ses engagements envers ses assurés et bénéficiaires.
Les fonds d'investissement, y compris les fonds communs de placement, les fonds de pension et les fonds souverains cherchent à diversifier leurs portefeuilles et à équilibrer les risques en incluant des obligations, qui offrent souvent des rendements réguliers et prévisibles par rapport aux actions. Les fonds souverains, tels que ceux de la Norvège ou des Émirats arabes unis, investissent dans les obligations pour gérer les réserves de leurs pays et générer des revenus stables.
Enfin, les investisseurs particuliers participent également au marché des obligations, bien que dans une moindre mesure comparé aux institutions. Investir dans les obligations apporte une relative sécurité et des rendements réguliers qui peuvent par exemple compléter des pensions de retraite. Cela peut aussi diversifier un portefeuille d'actions, puisque les deux classes d'actifs évoluent en général à l'opposé.
Notations de crédit
Les agences de notation (les principales étant Standard & Poor’s, Moody’s et Fitch Ratings) évaluent la qualité de crédit des émetteurs d’obligations et attribuent une note aux émissions sur une échelle standardisée allant de AAA (la plus sûre) à D (en défaut de paiement).
La notation attribuée par ces agences influence fortement la perception du risque associé à une obligation et influence les décisions d'investissement des acheteurs potentiels, et donc le rendement et le prix des obligations de l'émetteur.
Les obligations les mieux notées sont perçues comme moins risquées et peuvent donc se permettre d'offrir des taux d'intérêt plus bas. À l'opposé, les obligations jugées comme les plus risquées doivent offrir des rendements plus élevés pour attirer les investisseurs. Cette différence de rendement, appelée prime de risque, reflète la compensation que les investisseurs exigent pour assumer un risque de crédit plus élevé.
La notation de crédit affecte non seulement la capacité d'un émetteur à lever des fonds, mais aussi le coût de financement à travers le marché des obligations.
Pour aller plus loin, consultez la page Notations et rating
Rendement d'une obligation et évaluation du juste prix
Calcul du rendement
Le rendement courant d'une obligation est calculé en divisant le coupon annuel de l'obligation par son prix d'achat. Par exemple, si une obligation qui verse un coupon annuel de 50 € est achetée au pair à 1 000 €, le rendement courant est de 5 %.
Cependant, le rendement à maturité (YTM, yield to maturity ou rendement actuariel) est une mesure plus complète qui prend en compte non seulement les coupons annuels, mais aussi la différence entre le prix d'achat et la valeur nominale de l'obligation, amortie sur la durée restante jusqu'à la maturité. Par exemple, si la même obligation est achetée 900 €, l'investisseur réalisera, en sus des coupons, une plus-value à terme puisque l'obligation sera remboursée 1000 €.
Facteurs qui influencent le rendement
Comme toujours en finance, tout rendement supérieur au taux sans risque (taux monétaire) est la contrepartie d'un risque.
Les obligations sont soumises à deux risques principaux, qui sont aussi deux sources de rendement.
Le premier tient à la sensibilité aux taux d'intérêt : lorsque les taux d'intérêt augmentent, le prix des obligations existantes baisse, augmentant ainsi leur rendement courant et vice versa. Les obligations à maturité longue sont plus sensibles aux variations des taux d'intérêt, et ont donc généralement des rendements plus élevés pour compenser ce risque accru. On parle de prime de maturité (term premium en anglais). La duration et la sensibilité sont deux mesures mesures de la sensibilité du prix d'une obligation aux variations des taux d’intérêt.
Le second tient au risque de crédit : le rsique de non remboursement en cas d'insolvabilité de l'émetteur. Les obligations émises par des entités moins solvables doivent offrir des rendements plus élevés pour attirer les investisseurs en raison du risque accru de défaut. On parle de prime de crédit (credit premium).
Risques des obligations
Tous les risques sont développés dans la page dédiée aux risques obligataires. Voici les trois principaux :
Risque de crédit
Il s'agit du risque que l'émetteur de l'obligation fasse défaut sur ses paiements d'intérêts ou de principal, ce qui peut entraîner une perte pour les investisseurs.
Risque de taux d'intérêt
Lorsque les taux d'intérêt du marché augmentent, la valeur des obligations à taux fixe existantes diminue car leurs coupons deviennent moins attractifs comparés aux nouvelles émissions à taux plus élevés. Le cours s'ajuste donc jusqu'à rendre leur rendement en ligne avec le marché.
Risque de liquidité
Une obligation peut être difficile à vendre rapidement sans subir une perte de valeur significative, souvent en raison d'un marché secondaire peu actif. Ce risque est faible sur les obligations d'État mais accru sur les petites émissions.
Types d’obligations
Si la majorité des obligations sont à taux fixe, la diversité de ce marché est très grande.
- Obligations à taux fixe
- Obligations à taux variable
- Obligations zéro coupon
- Obligations convertibles
- Obligations indexées sur l’inflation
- Obligations perpétuelles, hybrides et subordonnées
- Titres participatifs
- OPCVM et ETF obligataires
- Produits structurés obligataires
- Catastroph bonds, impact bonds et exotiques
Acheter des obligations
Il est possible d'acheter des obligations sur le marché primaire ou sur le marché secondaire, mais la grande majorité des échanges a lieu sur le marché secondaire.
Après avoir repéré une obligation intéressante, l'investisseur peut passer un ordre de bourse sur la place boursière qui cote l'obligation afin d'acheter des titres. Toutefois, et c'est l'une des différences avec le marché des actions, le marché boursier électronique ne recense qu'une partie seulement des réels échanges. La majorité des échanges se fait entre professionnels, de gré à gré (OTC, over the counter), et passe donc totalement inaperçue sur le marché boursier.
En outre, les minimums d'investissement liés aux nominaux des obligations (souvent supérieurs à 1000 €, voire 10 000 € ou 100 000 €), rendent l'accès difficile et la diversification encore plus.
L'investisseur particulier est donc souvent limité dans ces choix. Les fonds d'investissement, qu'ils soient actifs comme les OPCVM traditionnels, ou passifs et indiciels comme les ETF, sont souvent la meilleure alternative pour acheter des obligations et bénéficier d'une diversification clés en main.
Pour aller plus loin :
- Une très bonne série de 3 articles sur l'histoire des obligations, sur le site du Nouvel Economiste